J'ai pour habitude de travailler sur des séries. Il conviendrait ici de consacrer un article complet à cette notion de "série" et je le ferai dans un prochain billet, mais pour faire court, il s'agit de travailler sur un ensemble de photographies allant de 3 à 50 images (ou plus pour les plus fous d'entre-nous) cohérentes entre elles (dans le traitement des couleurs, dans le sujet abordé, dans le type de matériel utilisé etc ...) et puis parfois je m'octroie le droit de réaliser des images sans but précis, au fil de promenades improvisées, dans des lieux que j'imagine inexplorés depuis des siècles (oui, je me raconte facilement des histoires ...). Ces promenades photographiques ont plusieurs fonctions : elles permettent d'explorer des techniques nouvelles (un peu comme dans un carnet de croquis) que nous n'avons pas l'habitude d'utiliser (pour cette image par exemple, le noir et blanc et la nature morte, alors qu'à l'époque je ne travaillais que sur la couleur et l'intimité) et amènent éventuellement à découvrir des sujets que nous pourrions avoir envie de développer. Ils ont également une fonction capitale : celle de nous changer les idées, de regarder ce que nous n'avons plus l'habitude de voir (ou l'inverse), de photographier en totale liberté et sans contrainte. Cette photo a été réalisée lors d'une promenade dominicale dans une campagne que je ne connaissais pas et je suis presque tombé amoureux de ce tracteur au regard triste, suppliant, presque vivant, laissé là à l'abandon.Qui aurait cru que ce tracteur esseulé serait à l'origine d'une de mes future série, quelques années plus tard : "Natures Mortes", qui me permettra de découvrir que pour réussir une photographie il faut apprendre à en aimer le "sujet" quand bien même celui-ci serait un objet. A quel point également, un objet pouvait permettre de photographier les fantômes de ceux qui en avaient eu l'usage, combien les traces laissées par le temps sur la matière permettaient d'inventer des histoire riches et fascinantes ...